Il y a une dizaine d'années, après un voyage au Moyen-Orient, j'ai réalisé la peinture où figurait une grande tôle ondulée servant de mur à un abri que j'avais repéré à flanc de colline. Rien d'autre, sauf dans le coin supérieur, était un petit tapis de prière rouge, un petit carré, un lieu de confiance, d'humanité, sur la plaque rouillée et branlante d'insécurité.
À quelques reprises, au cours de mes activités artistiques, j'ai travaillé auprès de personnes dont la voix parle mais n'est toujours pas entendue, dont les besoins sont impératifs et pourtant négligés, dont l'existence est éminemment menacée et pourtant peu importe. Ils étaient étiquetés élèves de banlieue, analphabètes, migrants, enfants de migrants, femmes en prison, malades. Tout ce qui laisse entendre des monstres.
N'importe quel monstre, que nous pourrions être si nous étions réduits à l'étiquette qui nous est donnée.
Mais nous ne le sommes pas.
Nous, tout le monde.
 
Cependant, je peins toujours ce petit morceau de confiance rouge dans mon esprit. Depuis trop longtemps maintenant, je me demande ce que je pourrais faire pour aider à soulager la situation des personnes qui ont dû quitter tout ce qu'elles étaient et avaient dans leur pays d'origine et qui ont besoin du suivi le plus élémentaire pour leurs soins de santé. Être demandeur d'asile implique que chaque aspect de la vie doit être considéré à partir de zéro, donc d'une position vulnérable. Sans un médicament aussi courant pour nous que le paracétamol, une forte fièvre causée par une maladie bénigne peut tuer un enfant. Atténuer la fragilité de ces personnes, les aider à poursuivre leur effort personnel, nécessite des soins de santé, urgents, les premiers pas et les gestes qui sauvent des vies. Cette responsabilité très spécifique est entre nos mains. Parce que les mains de ces gens là sont simplement vides pendant cette situation critique qu'ils traversent.
Alors que le flux d'informations nous nourrit chaque jour, serons-nous étiquetés comme ignorants, indifférents, égocentriques?

Catherine Aubelle, le 12 avril 2020.